Jay-Z et Beyoncé critiqué par des amis et collaborateurs de Jean-Michel Basquiat pour la récente campagne de Tiffany & Co.

Le mois dernier, JAY-Z et Beyoncé ont été l’égérie d’une nouvelle campagne publicitaire de Tiffany & Co. intitulée About Love dans laquelle la chanteuse de Lemonade arborait, entre autres, un collier en diamant jaune de 128,54 carats d’une valeur de 30 millions de dollars. Néanmoins ni les Carter, ni les joailleries de luxe n’ont cristallisé outre mesure l’intérêt du public. Les regards critiques et militants étaient tournés vers le rare tableau de Jean-Michel Basquiat accroché en arrière-plan de la photo. Plusieurs amis et collaborateurs de l’artiste, décédé en 1988, ont condamné la campagne qui mettait en scène une pièce originale et inédite de Basquiat : Equals Pi.

Un usage aux antipodes des valeurs de Basquiat : Des voix s’élèvent dans le public et parmi les proches de l’artiste

Selon la plupart des internautes, Basquiat, pour anticapitaliste qu’il soit, ne devrait pas figurer sur une campagne de luxe. La communauté artistique estime que cette exploitation consumériste de l’œuvre, va de par ses symboles à l’encontre des valeurs de l’artiste.

En effet, le légendaire diamant jaune Tiffany de 128,54 carats, arboré par Beyonce, a été découvert en Afrique du Sud en 1877 à la mine de Kimberley par Charles Lewis Tiffany. Quand on sait que dans les années 1970, lorsque la pierre a été découverte, les forces britanniques avaient lancé des batailles de conquête contre les tribus et les travailleurs africains, il est logique d’entendre que cette industrie minière a ouvert la voie à l’apartheid. Un fait historique souligné par les utilisateurs des médias sociaux, qui tout en l’associant aux exactions colonialistes, sont allés jusqu’à dire que Beyoncé portait un “diamant de sang”.

A la suite des internautes, Jay-Z et Beyoncé affrontent également les critiques de certains des proches et collaborateurs de Jean-Michel Basquiat.

“J’avais vu la publicité il y a quelques jours et j’étais horrifiée”, a déclaré Alexis Adler, qui a vécu avec Basquiat entre 1979 et 1980, au Daily Beast. Elle a ajouté : “La commercialisation et la marchandisation de Jean et de son art à ce stade – ce n’est vraiment pas ce qu’était Jean.”  

En faisant remarquer que si Basquiat était vivant, il aurait voulu que ses tableaux soient mis à la disposition du public dans les musées, elle a exprimé sa désapprobation quant au fait que Equals Pi soit désormais accroché en permanence sur les murs du magasin phare de Tiffany sur la Cinquième Avenue. “Malheureusement, les musées n’ont découvert l’art de Jean que tardivement, si bien que la plupart de ses œuvres sont entre les mains de particuliers et que les gens n’ont pas l’occasion de les voir, sauf lors des expositions”, a-t-elle déclaré. “Pourquoi le montrer comme accessoire d’une publicité ? Prêtez-le à un musée. À une époque où il y avait très peu d’artistes noirs représentés dans les musées occidentaux, c’était son objectif : se retrouver dans un musée.

De son côté, Stephen Torton, qui a encadré des centaines de tableaux de Basquiat et qui fut son assistant pendant de nombreuses années, estime que dans d’autres contextes,  Tiffany’s n’aurait même pas laissé Basquiat entrer dans son magasin. “Ils n’auraient pas laissé Jean-Michel entrer dans un Tiffany’s s’il voulait utiliser les toilettes, ou, s’il allait acheter une bague de fiançailles et sortait une liasse de billets de sa poche”, a-t-il déclaré.

La réponse de Tiffany & Co. 

Dans une interview accordée au WWD, le vice-président de Tiffany & Co., Alexandre Arnault, a suggéré que le choix du bleu robinier par Basquiat dans l’œuvre était une ode à la marque de luxe.

“Nous savons qu’il aimait New York, qu’il aimait le luxe et qu’il aimait les bijoux”, a-t-il déclaré. “A mon avis, cette [peinture bleue] n’est pas le fruit du hasard. La couleur est si spécifique qu’il doit s’agir d’une sorte d’hommage.” Une réponse qui n’est pas du tout du goût de Al Diaz, un collaborateur créatif de Basquiat qui a travaillé à ses côtés sur leur duo de street art SAMO. Il fustige cette assimilation grotesque en déclarant : “Les gens pensent que son association avec le luxe était parce qu’il était impressionné par cette merde, mais il ne pouvait pas s’en soucier moins. Il ne s’agit pas seulement de porter un costume Armani. S’il en portait, c’est parce qu’il pouvait l’acheter et le foutre en l’air, ce n’était pas parce que les coutures étaient fabuleuses ou bien faites.”

Sidoine
Sidoine
Journaliste et traducteur EN-FR, je suis passionné d'Internet, de technologies, de crypto-monnaies et de musique, le Rap tout particulièrement. Je suis tombé dans le chaudron de MC Solaar lorsqu'avec l'aide du druide Jimmy Jay, il préparait l'album Qui sème le vent récolte le tempo.

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