Les meilleures introductions dans le rap français : années 2000

Poursuivons notre sélection des meilleures introductions de rap français avec les années 2000. Une décennie marquée par le duel Booba/Rohff et par des rois sans couronne.

Après un premier épisode qui revenait sur les meilleures introductions des années 90 dans le rap français, direction les années 2000. Difficile de ne pas remarquer la présence monstre de Booba, cité à trois reprises. Cependant, l’éviction d’un de ses titres n’aurait pas été honnête intellectuellement, tellement il a marqué de son empreinte la décennie. Autre présence remarquée, celle de Skread à la production avec trois citations, et pas des moindres…

Lunatic – « Introduction Mauvais œil »

Booba et Ali, le Yin et le Yang, le libéralisme et la sagesse réunis dans une seule entité. Si la longévité du duo ne laissait guère de doutes, ils sont parvenus en un album à livrer l’un des meilleurs projets de l’histoire du rap français.

À la production, Animalsons permet à Lunatic d’allier leurs textes à des instrumentales sombres presque oppressantes. Un son qui met la pression. Sur l’introduction de cet album, courte, sèche, une phase de Ali résume bien la dualité du disque : « Ainsi est la vie / Chaos et harmonie / Armes et monnaie ».

Fonky Family – « Art de rue »

https://www.youtube.com/watch?v=cjqs8L6PGiE

« Ambiance scandale danse de vandales / Sens d’où vient la chaleur / Gloire à l’art de rue / DJ, Breaker, Bboy, Graffeur, Beatbox / Jusqu’au bout art de rue ». L’essence de la Fonky Family est réunie en un refrain. Une certaine idée du rap et plus généralement du hip-hop incarnée par le groupe marseillais.
Le clip est dans cet esprit, et montre tout autant les quatre rappeurs que les hommes de l’ombre, producteurs, DJ et danseurs. Une introduction d’album, propre au début des années 2000, magnifiée par le travail de Pone aux machines.

Booba – « Temps mort »

« Une putain d’époque mon pote, ici il faut des putains de dorsaux / Un putain de morceau et tous les blocs ont leurs Glocks / Sous les doudounes, poc poc ! Boulogne mon putain de dôme ». La transition de Booba vers un rap toujours plus egotrip se fait sentir dès son premier album solo. Sur une production des plus étranges de Fred le Magicien, Booba bombe le torse et entame son règne sans fin sur le rap français.

Booba – « Tallac »

Tallac est-elle une des plus grandes introductions des années 2000 et de l’histoire du rap français ? La plus grande ? Sûrement. Pour répondre à MC Jean Gabin sur son nom d’artiste, B2O s’y prend de la meilleure des façons. En plus d’une déflagration de lyrics, il sample de manière ironique le dessin animé Booba. A noter que cette production fera décoller Skread. Le beatmaker s’allie parfaitement avec un Booba en lévitation.

Rohff – « Intro La Fierté des nôtres »

En l’espace d’un seul mois, le rap français verra en 2004 « La fierté des nôtres », s’enchaîner avec « Panthéon ». Ce double-album aux allures de mastodonte voit Rohff s’asseoir sur le triomphe, littéralement. Produit et mixé en partie par des américains notoires (Richard Segal Huredia), ce projet brillant et dense démontre toute la polyvalence d’Housni. Sur l’intro, il arrive au port du rap comme le Queen Mary et repart en distribuant des baffes… Plutôt bien résumé.

Tandem – « 93 Hardcore »

Iconique. On cite souvent (à raison) le clip de « Pour ceux » comme précurseur dans le rap hardcore. « 93 Hardcore » de Tandem en est le digne héritier. Introduction du dernier projet du duo, C’est toujours pour ceux qui savent, ce titre est un modèle de violence à l’écran et en écriture. Symbolique, frontale, la brutalié est partout et bien aidée par les couplets des écorchés vifs, Mac Kregor et Mac Tyer. Même les apparitions de Patrice Quarteron et de John Rachid n’empêcheront pas le clip de rester dans les mémoires.

Lino – « Interview »

https://www.youtube.com/watch?v=fALmMsHrcg8

En ouverture de l’album Paradis assassiné, Lino réalise une interview de lui-même. En agissant ainsi, il se dévoile façon carte d’identité. Le morceau se place dans la continuité d’Ärsenik puisqu’il commence par les dernières mesures du titre « Paradis assassiné », présent sur l’album Quelque chose a survécu.

Produit par Gallegos, ancien de la Cliqua, l’introduction est un temps-fort d’un album qui ne sera pas à la hauteur du talent de Lino. Reste malgré tout, des flows millimétrés et un sens certain de la formule : « T’as connu de bons flics ? Non, j’ai pas compris la question ».

Unité 2 Feu – « Les mêmes cartes »

Avant de signer en maison de disques et de plaire aux adolescents du forum 18-25, Alkpote formait un duo de feu dans les années 2000 avec Katana. Signé sous le label Néochrome, le duo d’Evry vient braquer le rap français à coup de paroles glaçantes avec le double album intitulé Haine, misère et crasse. Unité 2 Feu affiche dans son introduction, sa haine de la « France côté porc ». Une France qui s’écroule comme un château de cartes, à cause des déflagrations de l’unité de flamme.

Alpha 5.20 – « Le boss veut te voir »

Alpha 5.20, à l’origine de la structure Ghetto Fabulous Gang, marque d’abord son époque par une touche de sincérité et d’amateurisme. Amateurisme au sens où il ne suit pas les codes. Par exemple, il va dans les cités en camionnette pour faire entendre sa musique directement sur le terrain. Entre attitude gangsta et fond religieux, Alpha 5.20 dénotait clairement dans le paysage du rap français. Dans l’introduction de « Vivre et mourir à Dakar », Alpha 5.20 livre sa science bien à lui du name-dropping : « J’représente Ben Laden ou Tony Montana / Afrique de l’Ouest, Burkina à la Thomas Sankara » .

Salif – « Yoyo »

Salif, ou le rappeur préféré de ton rappeur préféré. Après le duo de Nysay, le Boulogne Boy marquera la décennie 2000 en solo. La production est signée Skread et le titre marque l’introduction de Boulogne Boy, l’album avant l’album. Ici, la précision des images, un talent propre à Salif, n’est pas usurpé.

Sous une fausse simplicité, se cache une finesse d’écriture : « Pense au cercueil quand le moral est au plus bas » ou encore « Chez nous le taf c’est plus difficile à trouver qu’un 6.35 ». Tel le Yoyo en prison qui permet aux détenus de se passer des objets de cellule en cellule grâce à des draps déchirés.

Nessbeal – « Rimes instinctives »

« T’avais déjà un flow de merde avant que les tours ne s’effondrent », ce missile verbal à honorer tous les 11 septembre est signé Nessbeal. Roi sans couronne autoproclamé, l’ancien de Dicidens rappe l’injustice dans une longue marche funèbre. Ne2s vient récupérer son trône et cette introduction fait guise de titre immanquable des années 2000.

Le morceau est encore une fois produit par Skread, qui aura définitivement signé quelques-unes des meilleures introductions de rap français des années 2000. Les lyrics combinées aux violons viennent gifler les joues rougies comme la torpeur hivernale. Mais au fond Nessbeal, connaissait son destin : « C’est comme Van Gogh, Ness sera couronné le jour de son trépas ».

Airquentin
Airquentin

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