Retour vers le classique: “Laisse Pas Trainer Ton Fils” de NTM

Et encore un classique pour cette semaine ! Encore un oui, on ne s’arrête pas tant qu’il y a de bon sons à découvrir, ou à faire redécouvrir. Bien que pour aujourd’hui, il est quasiment sûr et certain qu’aucun d’entre vous n’ai jamais pu prendre connaissance du son qui va suivre. Si l’on devait résumer le rap français à une seule chanson, à un seul artiste, alors nous serions en présence d’un sérieux prétendant. Mais artiste ai-je dit ? Il faudrait plutôt parler de groupe, puisque nous sommes en présence de NTM, ni plus ni mois que l’un des piliers du rap hexagonal. Et si l’on a toujours maintenu que le rap est avant tout un véhiculeur de message, cela n’a jamais été aussi vrai qu’avec le classique “Laisse Pas Trainer Ton Fils”.

La morale, cette petite voix du rap

Il est très certainement inutile de présenter NTM. D’autant plus que nous avions déjà pu en parler à travers d’un précédent Retour vers le classique portant sur l’album “Suprême NTM” dont est d’ailleurs issu notre chanson du jour. Le duo parisien composé de Joey Starr et Kool Shen rempile en 1998 pour un dernier projet qui a pour but de faire date et marquer les esprits. Un succès garanti, et on le doit quasiment à un seul son: “Laisse Pas Trainer Ton Fils”. Il s’avère être un classique immédiat, que beaucoup considèrent encore aujourd’hui comme le meilleur que NTM pouvait donner. Il faut dire qu’on est là en plein dans le rap à texte, où les mots sont les principaux instruments et où les MC’s parlent avec le coeur. Un rap sincère donc, bien loin de véhiculer une quelconque image et qui se veut contemporain (“A l’aube de l’an 2000/Pour les jeunes c’est plus le même deal”), s’adressant à la jeunesse auditrice d’alors. Si Kool Shen affirme que le système ne fonctionne plus (“…le système à la tête sous l’eau”) et que la rue semble le dernier échapatoire possible (“Seule issue la rue même quand elle est en sang”), l’ensemble du texte se veut justement une mise en garde contre la violence ! Là ou plus d’un rappeur glorifie la mentalité, le style et les agissements de gangstas, ici NTM prend à contre pied cet aspect puisqu’il met au contraire en évidence la dure réalité, en allant jusqu’à s’adresser aux parents eux-mêmes: “C’est ça que tu veux pour ton fils ?/C’est comme ça que tu veux qu’il grandisse ?”. Une volonté évidente de faire la morale, bien que le MC souhaite garder une certaine modestie: “J’ai pas de conseil à donner”. Il insiste en fin de couplet sur l’absence d’amour témoigné par les parents, ce qui conduit un jeune à la délinquance. une idée qui est immédiatement reprise par Joey Starr pour débuter son couplet, puisant dans son propre vécu afin de nous parler de sa propre expérience (“C’est avec ces formules, trop saoulées, enfin faut croire/Que mon père a contribué à me lier avec la rue”). C’est aussi un moyen pour lui de dépeindre l’état d’esprit des jeunes qui se sentent libres de tout commettre (“Plus d’interdit, juste avoir les dents assez longues/Pour croquer la vie, profiter de tout ce qui tombe”). S’appuyant sur cet exemple de relation rompue (“Croyant la jouer fine. Il ne voulait pas, ne cherchait même pas/A ranger ce putain d’orgueil qui tranchait les liens familiaux”), Joey rejoint aussi son partenaire en assurant qu’il ne veut pas se prendre comme un exemple universel (“Désolé si je m’immisce”).

Un classique absolu

Si on parle de “Laisse Pas Trainer Ton Fils” aujourd’hui encore, ce n’est pas seulement par simple nostalgie ! Avant tout, il faut bien rappeler que le thème principal de l’oeuvre est encore et toujours d’actualité, et que le message d’hier peut tout à fait trouver son écho aujourd’hui. De par sa façon de dépeindre le mode de vie et surtout la mentalité de la jeunesse, tout en s’adressant aux parents (le refrain “Laisse pas traîner ton fils/Si tu ne veux pas qu’il glisse/Qu’il te ramène du vice”), on peut dire que NTM sait parfaitement bien passer son message. Sans prétention, sans jouer les professeurs, et même en prenant en exemple leur propre parcours et erreurs comme le fait Joey Starr, ils se mettent au niveau de leur cible. Kool Shen pousse même jusqu’à laisser imaginer que le mal est déjà fait (“Que voulais-tu que ton fils apprenne dans la rue ?”). Ne voulant pas incriminer les jeunes, il met également en avant le cercle vicieux que crée ce genre de comportement (“Quand pour les yeux des autres, tu joues de mieux en mieux ton role/Ton role de “caille-ra”, juste pour ne pas”). Et pour revenir à l’idée de vécu difficile exprimée dans le premier couplet, il ajoute qu’il s’agit avant tout de survivre (“Sache qu’ici-bas, plus qu’ailleurs, la survie est un combat”).

C’est en dépeignant une telle véracité dans leurs propos et n’hésitant à prendre à revers un thème (celui de la délinquance) de tout temps utilisé dans le rap que NTM réussit à frapper un grand coup. Pour une fois, on prend le temps de s’arrêter, se poser, et finalement ne pas vanter une vie dans l’illégalité. Faisant prendre conscience des relations familiales et appelant à une certaine maturité de chacun, “Laisse Pas Trainer Ton Fils” est de ces sons qui font réfléchir encore bien après que les violons se soient tuent. Et si ça c’est pas la preuve d’un grand classique…

 

image cover album Suprême NTM de NTM
pochette de l’album “Suprême BTM”
Rabeat
Rabeat

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