L’histoire des Black Dragons : les chasseurs de skinheads à Paris dans les années 1980

Retour sur l’incroyable histoire des Black Dragons, ce gang créé dans les années 1980 en Île-de-France.

Les Black Dragons ont réuni de nombreux jeunes noires s’organisant autour d’un objectif commun : chasser les groupuscules racistes qui sévissaient dans Paris à l’époque.

Un contexte social tendu

Depuis les années 1970, on a assisté à une résurgence du racisme dans la société française. A la suite de la guerre d’Algérie, d’une forte vague d’immigration et de difficultés économiques dans le pays, des factions racistes se sont constituées à travers le pays, de plus en plus séduites par les idées de l’extrême droite. A Paris, les skinheads sévissent et organisent des expéditions punitives à l’égard d’immigrés et de personnes de couleurs. Divers branches voient le jour, notamment les étudiants de la fac de droit Assas sous le nom de “GUD”, “l’Ordre Nouveau” et le « Klan » de Serge Ayoub alias Batskin.

Face à une police dépassée par ces gang organisés mais difficiles à cerner et à cadrer, des groupes antifascistes se forment en opposition. Les Red Warriors et les Ducky Boys en tête, mais aussi les Black Dragons.

Soutenir une cause

C’est Yves Levent qui est le père des Black Dragons en France, qu’il fonde aux alentours de 1983. A la base, l’association a pris ses racines aux États-Unis, à Miami. Elle même issue d’une branche des Black Panthers. Un mouvement créé dans les années 1960 outre-Atlantique qui a pris une ampleur énorme à travers tout le pays, luttant envers la ségrégation raciale en vigueur à l’époque et par extension les extrémistes du Ku Klux Klan.

Installé dans le nord-est de la capitale, son fief étant Montreuil, Levent prône les mêmes valeurs que ses prédécesseurs américains : combattre le racisme sous toutes ses formes en formant un groupe de combattants prêts à tout pour défendre la cause.

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La discipline au sein de la structure grandissante doit être strictement respectée. Les nouveaux passent des rites d’initiations, se faisant notamment tabasser par des anciens pour vérifier qu’ils ont des tripes. La pratique de divers arts-martiaux est essentielle pour survivre aux bastons, chaque membre devant maîtriser une discipline de combat comme le karaté, le taekwondo, la boxe ou le kickboxing. Des jeunes noires qui viennent de quartiers différents, qui ne se connaissaient pas avant, mais qui décident de s’unir pour aller chasser des skins.

Très vite, les Black Dragons deviennent un crew respecté dans Paris intra-muros et squattent La Défense pour chasser le gang ennemi. Que cela soit en plein après-midi ou dans la nuit, les confrontations sanglantes étaient légions, parfois en supériorité numérique parfois attirés dans des coupes-gorges à un contre dix. Avec l’aide des autres crews, face à des adversaires moins nombreux mais tenaces, les Black dragons permettent de nettoyer Paris des skins qui avaient investi la capitale.

Controverses et guerres de gangs

Si la nature violente de leur combat, bien qu’on puisse juger celui-ci légitime, faisait déjà mauvaise presse, plusieurs événements vont avoir raison du bon fonctionnement des Black Dragons. Au début des années 1990, la lutte contre les skins n’est plus centrale. Des guerres entre divers groupes se déclenchent, souvent pour des histoires de soirées et de femmes. Notamment contre les Requins vicieux et les Mendy’s, qui contrôlaient Mantes-la-Jolie. Levent, qui purge une peine de prison à cette époque clé, ne peut que constater la dégradation du mouvement.

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« La guerre des gangs a été plus violente que la guerre contre les skins, comme deux frères d’une même famille qui se disputent. » constatait tristement pour Vice le BD de la première heure Patrick Lonoh. Une guerre qui s’est propagée dans tout Paris du fait des alliances entre chaque gangs.

A cause de guerres d’ego, de procès envers des membres et de l’épreuve du temps, les Black Dragons ont laissé passer leur âge d’or. Leurs membres, aujourd’hui âgés pour la plupart d’une cinquantaine d’années, sont moins nombreux mais portent toujours la philosophie « zoulou » en eux. Ils auront marqué les guerres de gangs des années 1980 et permis de chasser les skins de Paris.

Sim
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