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[Chronique]: Booba est-il toujours assis sur le “Trône” ?

Au final, c’est la question que tout le monde a à la bouche. Sur son précédent projet, ”Nero Nemesis”, Booba avait fini par mettre presque tout le monde d’accord (les puristes qui disent que c’était mieux avant mis à part). Il était alors à la pointe de la trap, la tendance du moment, qui a perduré depuis, avait retrouvé des punchlines incroyables et sorti un album assez court, mais extrêmement dense. Il en était à un point où on se disait presque qu’il fallait qu’il ne pouvait peut-être pas faire mieux, et qu’il fallait donc faire différemment.

Se renouveler, Booba connaît. Globalement, on peut différencier trois B2o différents : le premier, racailleux, désabusé et ambitieux, qu’on voyait sur Lunatic. Le deuxième a commencé à émerger à partir de ”Ouest Side” en 2006, beaucoup plus gangster, egotripé, dans une vibe plus ”dirty south”, qui a tenu jusqu’à la mort de Brams et la sortie du morceau ”Bakel City Gang” sur ”Autopsie vol.4” en 2012, où on sentait une nouvelle volonté de choquer encore plus, et de se placer fermement dan une logique de ”moi contre le reste du monde”, détaché de tous liens avec le reste des gens, puisqu’il vit la vie d’un millionnaire.

On avait commencé à entrevoir un quatrième Booba, beaucoup plus ”africanisé”, aidé par la déferlante afro-trap qui a suivi le succès de MHD. Sur Validée”, ou encore sur DKR, avec une volonté qui semblait alors assez marquée de remettre l’Afrique au centre de sa musique. Cet album va-t-il marquer l’avènement du quatrième Booba ? Réponse dans cette chronique.

Il y a toujours du génie

Autant qu’on se le dise tout de suite, il y a toujours du génie dans un disque de Booba. Même sur des albums un peu ratés comme ”Lunatic” ou ”0,9”, il y avait toujours quelques bons morceaux. ”Trône” ne déroge pas à la règle, et contient son lot d’éclairs de génie jaillissant de la plume du Duc. Les ambiances sont également assez diversifiées, du kickage comme dans ”Drapeau Noir” aux sons trap autotunés comme ”Magnifique” ou un peu plus dansant sur ”DKR”.

Pour les meilleurs morceaux, on va nommer ”Drapeau Noir”, le titre ”Bouyon” avec Gato, toujours aussi efficace pour un gros banger. Le morceau ”113” avec Damso est assez costaud, même si Damso a mangé le Duc (selon notre avis). Évidemment, gros coup de cœur pour ”DKR”, qui passe même sur France Inter. Et ça, ça veut dire que des mamans quinquagénaires écoutent du Booba, et savoir ça, ça réchauffe le cœur. Le morceau ”Trône” est assez bien, mélancolique et egotripé comme il savait le faire. On a également quelques morceaux de ”loveurs” à la Booba : des sons doux mais avec des lyrics très vulgaire où il nous fait comprendre qu’il a des problèmes avec les sentiments.

Évidemment les punchlines sont au rendez-vous. ”J’suis un macaque selon Darwin, j’ai une grosse bite selon Marine”, ou ”depuis Wu-Tang j’suis le parrain, je suis Bruce Wayne t’es le pingouin”, ou encore ”Y’a que le shit que nous coffrons, il ne va jamais très profond”, dernière née d’une logue lignée de punchline sur la fierté de B2o d’avoir eu les cojones de planquer du shit dans son cul pour ravitailler la prison. On ne sait pas si c’est vrai, mais franchement, vous l’auriez inventée celle-là, vous ? Évidemment, quelques punchlines pour La Fouine, Rohff, sans les nommer explicitement, et même Sinik. On vous laisse les chercher vous mêmes. Ça vous fera une occupation…

Mais plus assez

… car pendant le reste du projet, on s’ennuie un peu. Mis à part les quelques titres mentionnés qui sont vraiment bons, le reste est assez moyen, du moins, très loin du niveau auquel il était dans son précédent album il y a deux ans. Déja, les prods ne surprennent plus. Elles sont de qualité, mais elles sont assez communes, et c’est dommage pour Booba de ne pas avoir réussi à trouver assez de prods qui se démarquent.

Dans l’idée, un morceau comme ”Magnifique” n’a pas grand chose à faire sur cet album, au niveau du flow, on a presque l’impression de retourner à l’époque de ”AC Milan”. Le morceau ”Ça va aller” avec Niska et Sidiki Diabaté est une jolie tentative, mais un peu ratée, et ça n’est pas franchement plus réussi que les autres hits ”club” auxquels ça ressemble. Le refrain est même assez chiant… Si on rajoute à ça le fait qu’on connaisse ”DKR” et ”Elephant” depuis des mois maintenant, ça commence à faire beaucoup.

Beaucoup d’eogtrip, une jolie chanson pour sa fille, globalement, Booba n’a pas beaucoup changé, et c’est peut être ça le problème. On attendait quelque chose de vraiment terrible après ses deux ans d’absence (la plus longue pause de sa carrière, presque), ou au moins de nouveau, mais au final, il n’y a ni avènement du troisième Booba, ni apparition claire du quatrième, avec finalement assez peu de sonorités africaines. Il fait ce qu’il faisait avant à peu de choses près, ce qui est dommage, car d’autres figures de l’egotrip sont apparues depuis son dernier album : SCH, Damso, Lacrim, Niska, et d’autres. Pour répondre à la question essentielle, le ”Trône” de Booba est donc plus que jamais menacé… Mais bon, au pire, il s’en tirera toujours en produisant des mecs incroyables comme Damso ou Kalash !