Les albums classiques du rap français dans les 90’s : 1991

Avant d’être au sommet des charts et d’être considéré comme de la musique populaire, le rap était vu comme une sous-culture controversée qui n’avait pas sa place dans le secteur artistique et culturel français. Venez découvrir avec nous les albums qui ont fait du rap ce qu’il est aujourd’hui, les classiques du rap français des années 90.

IAM – De La Planète Mars

De La Planète Mars est le premier album sorti par le groupe marseillais IAM (pour Imperial Asiatic Men ou Invasion Arrivant de Marseille, au choix) en 1991. Sans le savoir, ces six phocéens qui ne savaient pas trop dans quoi ils allaient mettre les pieds, posent l’un des premiers pilier du rap français jamais altéré par l’usure du temps.

Les bonnes bases sont déjà présentes : style métaphorique stylé Égypte ancienne et asiatique, flows rapides en adéquations avec les BPM de l’époque (120 en moyenne), parfois approximatifs et très hachés (c’est d’époque), et bien sûr des boucles soigneusement choisies et séquencées par Kheops et Imhotep, les deux architectes sonores. Les deux rappeurs Akhenaton et Shurik’N portaient un phrasé certain, même si la voix du premier fait un peu rire aujourd’hui. Et déjà les textes engagés comme “Non Soumis A L’Etat” qui montre clairement des intentions d’insoumis au système mais pas irréfléchies. On retrouve aussi leur engagement dans “Tam Tam d’Afrique”, chanson chère au cœur de Shurik’N, dénonçant les horreurs de l’esclavage et de la traite des Noirs. IAM ne véhiculait pas qu’un message engagé politiquement mais aussi universel, ce qui faisait leur force et leur cohésion.

Ces derniers ne se privent pas non plus d’egotrip, comme sur “Attentat”, racontant une soirée bien arrosée et bordélique, où encore “Le Nouveau Président”, une attaque directe au Front National trop présent dans la région qu’ils attaquent sans relâche.

Dorénavant, cet album est un classique du rap français, influençant la scène marseillaise durant la glorieuse décennie des années 90. C’était le début de la saga.

MC Solaar – Qui sème le vent récolte le tempo

MC Solaar a seulement 21 ans lorsque sort son premier single : “Bouge de Là”, en 1990. Véritable tube, ce morceau fait découvrir le natif de Dakar au grand public. La ligne de basse piquée au groupe de funk Cymande résonne dans tous les postes de radio et les paroles pleines d’humour se gravent dans les mémoires. Claude MC a réussi à conquérir un pays avec ce style nouveau qu’est le rap.

En 1991, il livre le premier album de sa carrière. Inspiré par le proverbe du livre d’Osée (“qui sème le vent récolte la tempête”), Qui sème le vent récolte le tempo comporte les premiers hits de celui que beaucoup considèrent comme le pionnier du rap français. On y retrouve  « Victime de la mode », critique sociétale dans laquelle on suit « Dominique », femme mal dans sa peau qui se réfugie dans la mode, régimes et autres programmes alimentaires. « Caro je suis l’as de trèfle qui pique ton cœur ». Tout le monde a déjà entendu cette phrase issue d’un autre tube qu’est « Caroline ». Voix feutrée, paroles susurrées avec tendresse, instrumentale délicate tout en mélancolie mais qui se permet une embardée aux accents ragga délicieuse, le tout fait mouche avec une efficacité redoutable et propulse de nouveau MC Solaar au devant de la scène !

En effet, à une époque où les téléchargements en ligne n’existaient pas encore, l’album Qui sème le vent récolte le tempo s’est écoulé à plus de 320 000 exemplaires. Véritable classique, cet album a fait naître le rap “grand public”, et a influencé plusieurs artistes et rappeurs par la suite.

Supreme NTM – Authentik

Authentik est le premier album studio du groupe parisien Supreme NTM, sorti en 1991. Ce projet est sorti dans un contexte particulier. En effet, on recensait à l’époque un climat social et politique tendu qui régnait en France, avec de violents affrontements entre policiers et jeunes de cités et des manifestations de lycéens virulentes dans la capitale.

À sa sortie, Authentik a frappé par l’aspect brut et la violence perçue comme désordonnée de ses propos. Le style de l’album, fait de textes hardcore scandés sur des beats rapides, est très influencé par le gangsta rap américain, alors peu écouté dans le pays hexagonal. À l’instar des rappeurs américains comme NWA, les membres de NTM utilisent leur rap comme porte parole social et politique au travers duquel ils lancent leurs revendications de sortir du déclassement dans lequel la société les enferme.

En effet, Kool Shen et JoeyStarr aborde des thèmes comme la problématique des banlieues, les problèmes qui l’entourent ainsi que l’exclusion ressenti par rapport à la société française. “Le monde de demain“, sorti en single avant l’album, en est l’exemple parfait. Le groupe y apostrophe les politiques quant à leur passivité et leur indifférence à cet égard, clamant que «La délinquance avance et tout ceci a un sens / Car la violence coule dans les veines de celui qui a la haine».

À travers cet album qui fut certifié disque d’or trois ans après sa sortie, Supreme NTM est tout de suite devenu le groupe pionnier d’un rap de protestation et de revendication, auquel plusieurs jeunes de banlieue ont pu s’identifier.

Découvrez également : Histoire de sample : Brother’s Gonna Work It Out

Gaspard Catry
Gaspard Catry

Dans la même rubrique

Recommandé pour toi