Ekloz est une jeune rappeuse pleine de talent et d’ambitions. Originaire de Sète, elle s’apprête à sortir son nouveau projet, Dimension, le vendredi 13 décembre.
On le sait, Demi Portion a toujours eu à cœur de promouvoir la scène rap / hip-hop de Sète, Montpellier et de ses alentours. Plus tôt cette année, son flair à déniché Ekloz, une jeune rappeuse de sa ville. Frappé par son potentiel, sa personnalité, et son talent au micro, il l’invitera à bras ouverts pour la quatrième édition de son désormais célèbre Demi Festival. Une aubaine pour la jeune femme qui n’attendait que de se dévoiler au public.
Galvanisée par sa performance au Théâtre de la Mer, portée par son amour du hip-hop et du travail bien fait, elle charbonne depuis plusieurs mois à l’élaboration de son nouvel EP, Dimension. Un projet aux allures de carte de visite qu’elle sortira le vendredi 13 décembre.
Pas le temps pour les superstitions donc. Ekloz a la dalle, a des choses à dire, et ça ne peut plus attendre. Histoire de mieux la connaître et de vous préparer comme il se doit à un voyage futuriste dans sa dimension, nous l’avons rencontré.
Salut Ekloz : Ton nouvel album, Dimension, sort la semaine prochaine. Comment tu te sens ?
J’ai la tête dans le guidon et j’organise la release party à Montpellier (le 12 décembre) et c’est plus ça qui me stresse plutôt que la sortie de l’album en elle-même. J’ai vraiment voulu faire les choses bien. L’album est fait et j’en suis satisfait. Après, c’est sur que les retours sur les réseaux vont être marquants.
A la base, tu ne viens pas du rap, mais de la danse ? C’est la danse qui t’a amené au rap ?
J’ai toujours fait de la danse depuis petite, ça fait quatorze ans. J’ai même carrément fait un bac spécialité danse. Mais tu seras surpris d’apprendre que ce n’est pas grâce à ça que j’en suis venue au rap.
Du coup, comment es-tu venue au rap ?
J’ai toujours secrètement voulu m’y mettre pour l’expression qu’il représente. Je m’y suis amenée toute seule. Au début, même si j’en avais envie, mais je ne me le permettais pas forcément. J’étais dans le lycée familial et c’était compliqué, car je ne m’y sentais pas à ma place.
Ma meilleure amie de l’époque était dans un autre lycée à Montpellier et elle m’avait dit que là-bas, ça rappait. Du coup, j’ai voulu y aller. J’ai feinté pour arriver à mes fins. En fait, je me suis servie de la danse comme prétexte pour changer de lycée en première.
Quand j’ai vu des gars rapper à des soirées, ça m’a fasciné tout de suite, et j’ai eu envie de rapper avec eux. A partir de là, j’ai charbonné et joué ma vie jusqu’à ce que j’estime avoir écrit un truc correct. Peu après, je suis revenu les voir en mode : “les gars, j’ai un freestyle”, et c’est parti de là. Ça remonte à il y a quatre ans. Avec du recul, j’ai pris conscience que le hip-hop m’avait happé, mais je me suis démerdé pour y arriver.
Dans tes clips, on voit que tu travailles beaucoup ta gestuelle. Même si tu n’en fais plus vraiment aujourd’hui, cherches-tu à lier davantage la danse à ta musique ?
Pour moi, la danse et la musique, c’est quelque chose de totalement différent, même si les deux disciplines sont liées. Si la danse était ma raison de vivre avant, elle a totalement été supplantée par le rap. Je ne danse plus assez pour avoir un recul suffisant. Je dirai même que je galère et ça me fous une grosse pression. Après, je vais essayer de vraiment y revenir et de l’incorporer encore plus à ma musique. J’y travaille et j’y réfléchis.
Avant de commencer à rapper, tu écoutais déjà du rap, ou c’est quelque chose que tu as découvert sur le tas ?
Le hip-hop, c’est quelque chose qui m’a touché au cœur. Je ne pense pas que ce soit une histoire d’époque. C’est propre à chacun et tu peux être touché à n’importe quel âge. Pour ma part, je me suis vraiment passionnée du rap que quand j’ai commencé autour de mes 15-16 ans. Avant, j’en écoutais, mais pas plus qu’autre chose. J’ai surtout été élevé à Ray Charles, Les Beatles, des artistes qui n’ont rien à voir en fait, sauf Gorillaz. Après, il y a eu un signe. Je me souviens que pour mes 10 ans, j’avais demandé l’album de Diam’s alors que je n’écoutais pas encore de rap. Je me suis pris une claque.
J’imagine qu’en t’y mettant, tu as refait ta culture ?
Forcément, car quand on pratique une discipline, on est obligé d’être critique et de tendre une oreille sur ce qui se fait. Après, il y a encore beaucoup de choses que je ne connais pas. En ce moment, j’écoute énormément de rap italien. Je ne comprends pas spécialement la langue, mais j’accroche vraiment à la mélodie quand ça rappe dans d’autres langues. C’est juste un kiffe pour moi, je ne fais pas ça pour m’influencer ou me forger une identité via ce qui se fait ou non. J’apporte mon truc parce que je pense que j’ai mon épingle à tirer du jeu.
Il y a eu un autre signe aussi : avant même le rap, l’écriture était dans déjà ton ADN.
Oui. Quand j’étais petite, j’écrivais des poèmes. Je me souviens en 2007 lors de l’élection de Sarko, j’ai écrit un poème sur lui. (rires). L’écriture a toujours fait partie de ma vie. Petite, j’étais l’enfant sage que tu foutais dans un coin avec un livre et c’était fini. Avec des parents qui ont des professions littéraires et une mère qui parle plusieurs langues, j’ai toujours eu cet amour des mots. Le rap, je suis allé le chercher après, quand j’ai entendu que des jeunes de Montpellier rappaient.
Cette année, tu as eu l’occasion de présenter ton univers au Demi Festival. Comment s’est faite la connexion avec Demi Portion ?
Même si j’habite à Montpellier maintenant, j’ai grandi à Sète donc on s’est croisé naturellement. Le rap du sud se porte bien, il y a pas mal d’artistes et on est solidaires entre nous. Rachid, je l’ai croisé plusieurs fois, il m’a écouté, fait rentrer à ses concerts, et il m’a demandé un jour si je voulais participer. C’est un gars super, franchement, je le remercie. Pour moi cette scène, c’était mon vrai premier pas. J’ai kiffé.
Quel regard portes-tu sur ta performance ? Qu’est ce qu’elle t’a apprise ?
Honnêtement, j’ai adoré ma perf et je trouve que c’est la meilleure que j’ai faite. C’était un tout nouveau set et j’en suis extrêmement satisfaite. Le Demi Festival m’a fait franchir une étape et m’a permis de faire une vingtaine de concerts depuis. Avant, j’avais très peur du rapport au public, et ça m’a totalement débloqué. Aussi, on a tourné les images du clip du morceau “Sauter” pendant ma performance.
Tu as aussi de très bonnes relations avec Peticopek…
A fond. C’est un artiste exceptionnel et une personne entière. Je lui dois beaucoup, car il me soutient depuis le début et c’est lui qui m’a fait faire ma première scène. C’est aussi chez lui que j’ai enregistré mon premier morceau, “J’balance”.
Ton premier projet Dolce Vita est sorti en 2018. Qu’est-ce qu’il représente pour toi, à l’aube de la sortie de ton album ?
Il est proche et en même temps lointain, car j’ai beaucoup évolué et appris cette année, en travaillant sur mon album. L’idée derrière Dolce Vita, c’était vraiment de proposer un premier projet pour montrer que je savais rapper. Après, dessus, il y a des sons que j’ai écrit il y a trois ans, mais qui me parlent toujours autant. Je pense que dans quinze ans, si je les rejoue, ils me rappelleront une époque.
Ton premier album s’appelle Dimension donc, et est résolument plus actuel ?
Yes. Aujourd’hui, j’ai eu besoin de me prouver que je savais aussi faire de la trap. Dans mon précédent projet, il y avait déjà trois morceaux trap, mais avec le recul, je les ai trouvé mal-exécutés. Cela dit, je ne veux pas qu’on me catégorise comme une rappeuse “actuelle” ni “à l’ancienne”. Sur cet album, je veux montrer que je sais autant rapper d’une façon que de l’autre
De toute façon, je pense que je serai toujours entre les deux écoles. J’aime les belles phrases les belles plumes, et c’est vrai qu’à part ceux qui sont très bons, la trap aujourd’hui, c’est minimaliste à ce niveau. Pour ma part, même quand je fais des morceau trap, j’essaye de mettre la forme.
Du coup, on y trouve quoi dans la dimension d’Ekloz ?
Ma dimension, c’est l’esprit hip-hop. Le fait que je veuille fédérer les gens dans quelque chose de nouveau et futuriste. J’ai la dalle. Je veux marquer le rap. Je n’ai pas envie d’être une rappeuse parmi tant d’autres.
Ce projet, j’ai pris du plaisir à le faire, car il m’a permis d’affirmer mon univers. Il m’a appris les dessous du studio, a lancé la machine, et m’a ouvert des portes. C’est une dalle posée qui amorce tout ce que je m’apprête à construire, car j’ai déjà deux projets d’avance. Depuis cet album, je sais où je vais.
Tu as d’autres trucs sur le feu donc ?
Oui, un album, mais je n’en parlerai pas pour l’instant. Ce que je peux dire, c’est qu’il y aura une réédition de Dimension, et plus de belles scène cette année. J’ai tellement hâte !
Quelles sont tes ambitions de carrière ?
Comme je te disais, j’ai envie de fédérer les gens et de faire repartir l’esprit du mouvement hip-hop. C’est quelque chose qui s’est beaucoup perdu, mais qui se retrouvent à des événements comme le Demi Festival justement. Aujourd’hui, je trouve qu’hormis quand tu es vraiment dedans, tu ne le ressens pas forcément le reste de l’année. Je veux redorer l’image du rap indé “familial” et “collectif”. C’est un esprit qui m’a marqué quand j’ai commencé. J’aimerais proposer des concerts dans l’esprit “Block Party”, comme je le fais jusqu’à présent, mais en allant toujours plus loin.
Photo : Ekloz par Yann Corneille
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