Dans notre tour des éléments incontournables du rap, on s’aperçoit bien vite qu’il suffit de ne pas chercher bien loin pour se rendre compte qu’on dispose déjà de certains piliers du hip-hop. Certes, on a déjà pu relater quelques grandes figures du rap américain, mais il ne faut pas oublier non plus que notre bon vieux rap français n’a pas à rougir de ses protagonistes, bien au contraire ! Aussi, je vous propose aujourd’hui de rester en France justement afin de retracer le parcours de certains MC’s qui auront su marquer l’histoire de la musique, et dont bon nombres de fans ou même d’amateurs ressortent encore le nom comme preuve incontestable de talent et de qualité. Les plus anciens et fins connaisseurs n’apprendront peut-être pas grand chose, bien que ce sera sûrement toujours un plaisir de relire le parcours de nos artistes. Les autres en revanche peuvent saisir l’occasion de parfaire leur savoir et culture rap. Le poison, ce n’est pas si mauvais que ça quant il s’agit de l’Ärsenik administré par Lino & Calbo.
Un duo mortel
Dans le rap français, on parle souvent de groupes populaires dans les années 90. On ne pourra évidement pas éviter les sacro saints IAM et NTM, et d’autres formations telles que la Fonky Family par exemple reviennent bien souvent quand il s’agit de donner des exemples. Et s’il y a bien un duo qui ne cesse de mettre tout le monde d’accord, c’est Ärsenik. En seulement deux albums et une compilation, ils auront réussi à retourner le rap français et à s’imposer comme monument culte. Où comment la simplicité peut s’avérer la plus parfaite des réussites…
Et tout commence en 1992 dans le Val-d’Oise (95), plus précisément à Villiers-Le-Bel, dans le quartier de la Cerisaie. Pour la formation, on fera simple puisqu’il ne s’agit que de l’association de deux frère congolais d’origine: Gaëlino et Calboni M’Bani. Mais raccourcissons donc leurs noms voulez-vous et appelons-les Lino et Calbo, ça sonne bien. Une institution familiale donc qui donne naissance à Art Sonique. Non non, ce n’est ni une faute de frappe ni une tentative de jeu de mots. A l’origine, c’était bel et bien le nom choisi pour le groupe. Mais trop de confusions dans la prononciation de beaucoup les emmènent à finalement donner raison à l’erreur et modifier le nom en “Arsenik”. Où comment un défaut de prononciation donne naissance à l’un des noms les plus populaire. Notons également pour les débuts la présence de Réty Bon Ap’ également appelé Le Cuisto. Et c’est donc en 1996 que le duo fera vraiment sa première apparition sur la compil’ “Hostile Hip-Hop” avec le titre “L’Enfer Remonte à la Surface”.
Ils enchaîneront sur une autre compilation (“L’Art d’Utiliser Son Savoir”) qui leur permettra de faire une rencontre plus qu’importante: celle de Djimi Finger qui réalisera la quasi totalité des titres de leur premier album.
Il faudra cependant entre temps faire face à l’incarcération de Rémy Bon Ap’, ce qui permet ainsi au cousin Tony Truand d’intégrer le groupe. Cependant il semblerait que le destin s’acharne à nouveau et en 1997, lors d’un retour au pays, ce dernier sera également retenu sur place pendant 3 longues années pour un problème de papiers ! De plus, à son retour, il se brouille avec les deux autres membres, mettant un terme à leur collaboration. Mais 1998 sera réellement le véritable tournant dans la carrière alors encore balbutiante du groupe.
Les premières lueurs d’un rayonnement sur le game
C’est en rejoignant le collectif du Secteur Ä que les deux frangins mettent réellement les pieds dans le game. Côtoyant Oxmo Puccino, Stomy Bugsy, Passi ou encore Doc Gynéco, c’est l’occasion rêvée pour faire ses armes (et ses preuves dans le milieu). S’ensuivra ainsi le tout premier album album d’Ärsenik, considéré encore aujourd’hui comme un classique indiscutable: “Quelques Gouttes Suffisent…”.
Un album qui cumule les réussites et est même certifié disque d’or à deux reprises (pour d’avantage d’informations le concernant, notre Retour vers le classique concernant l’album est disponible). Un projet qui va littéralement faire décoller le duo, qui prendra enfin une véritable importance. Popularisant la marque Lacoste au passage, ils deviennent le nouveau visage du rap français et ainsi multiplient les collaborations. Lino se démarque toutefois d’avantage de son frère, notamment de par son timbre de voix particulier, et on le verra à plusieurs reprises aux côté d’Oxmo (“La Loi du Point Final”) ou de Doc Gynéco.
On pourra encore entendre parler du groupe puisqu’il s’attèlera à réaliser l’album “Racine“ du collectif “Bisso Na Bisso”.
En 2002, le duo nous livre son deuxième projet: “Quelque Chose A Survécu”.
Certains y verront un clin d’oeil aux multiples reports de date de sortie précédent l’album. Fortement attendu et plébiscité par la critique, il est également très bien reçu et confirme un parcours sans fautes pour le groupe. Galvanisé par un tel succès, on s’attend à poursuivre l’aventure et d’ailleurs, les MC’s annoncent un troisième album pour 2005. Cependant, chacun songe également à un projet solo et repousse ainsi la troisième galette. Ainsi, 2005 se verra marqué par la sortie de l’album “Paradis Assassiné” de Lino (titre repris de la chanson éponyme du second album d’Ärsenik).
Cependant, malgré que chacun loue le talent de parolier de l’artiste, l’album n’obtient pas le succès escompté et Lino quitte le label EMI dans la foulée. Pour présenter cette expérience solo, il s’exprimait ainsi: “C’est mon premier album solo, moi je suis un artiste de groupe donc il a fallu que je me présente. C’est pas poussé au maximum, je dis ce que j’aime. C’est une présentation de ce que je peux être. Il faut le faire quand tu te lances en solo parce qu’il faut que les gens te situent”. Il retournera donc du côté de ses compères du Secteur Ä, participant à plusieurs projets. En 2017, un troisième projet vient enfin compléter la discographie d’Ärsenik. Il s’agit d’un best-of intitulé “S’Il En Reste Quelque Chose…”.
Une suite indécise… et un renouveau ?
Par la suite, Ärsenik se contente surtout de faire pas mal d’apparitions sur différents projets avec divers artistes, sans plus trop se concentrer sur des projets solos (bien qu’en 2012, Calbo publie enfin son propre album solo “Regarde Le Monde“. S’ensuit une recrudescence d’activité pour le groupe, qui multiplie les concerts dans toute la France et même à l’international. S’ensuit le second album solo de Lino en 2015: “Requiem”. Cette fois-ci, le succès est bien au rendez-vous, Lino réussissant à établir le pont entre ancienne et nouvelle génération d’auditeurs.
Avec un passage d’avantage marqué en solo et plus d’album en commun depuis 10 ans, on commence à penser qu’Ärsenik ne donnera pas suite à sa discographie, bien que le duo ne se soit pas vraiment officiellement séparé. Tout du moins jusqu’à l’annonce encore assez récente à laquelle pratiquement plus personne ne voulait croire: un nouvel album d’Arsenik devrait voir le jour courant 2018 ! Et qui plus est, Lino rempile avec un nouvel album solo pour fin 2017 ! Terminant avec la tournée L’Age d’Or du Rap Français, les deux frères poursuivront donc encore avec ces nouveaux projets. de quoi ravir les fans et même l’ensemble du rap hexagonal.
Quoiqu’il en soit, pour l’heure, on retient d’Ärsenik un duo d’exception, exemple parfait lorsque l’on parle de la qualité de la plume dans le rap. Fidèle à leurs débuts depuis toujours, Lino et Calbo n’auront jamais déviés de leur ligne artistique et auront toujours su poursuivre dans ce qu’il faisait d mieux. Entre morceaux et albums classique, collaborations diverses et au final, représentation à eux seuls de toute une école, ce sont là des MC’s hors-normes. Quelques gouttes suffisent à nous rendre accro, et on espère sans cesse qu’il en reste encore quelque chose, jamais rassasiés que nous sommes…