La nouvelle vous a très certainement touché vous aussi de plein fouet depuis sa propagation hier soir. On a tenté de croire à une rumeur, une mauvaise blague, mais bien vite l’évidence nous a fait face. En ce mardi 20 juin 2017, on a tristement appris l’annonce du décès du rappeur Prodigy. Une figure incontournable du monde du hip-hop, connu et reconnu par tous, qui s’éteint en cette année 2017. Vous le présenter serait évidemment inutile, au mieux bien futile. Et pourtant… Pourtant on ne peut se permettre de rester silencieux sans reparler de l’artiste, mais aussi de l’homme. En tant qu’hommage, afin de laisser une ultime trace écrite, nous vous proposons à travers cet article de revenir sur l’ensemble de la carrière du MC, son parcours solo mais aussi bien sûr le pan de l’histoire qu’il a su tracer en formant Mobb Deep. Retour aujourd’hui sur l’un des parcours les plus importants de l’histoire du rap US.
L’image du rap de New-York: Prodigy
C’est à Hempstead dans l’état de New-York que Albert Johnson voit le jour le 02 novembre 1974. Un enfant né dans la musique, sa famille l’ayant tout jeune baignée dans ce milieu puisque son grand-père et son oncle Budd et Keg Johnson ont tous deux participé à l’ère Bebop du jazz. De plus sa mère Fatima Johnson faisait aussi parti d’un groupe (The Crystals). Il grandit ainsi entre New-York et Detroit, tiraillé entre sa mère, son père et s grand-père qui alterne sa garde au rythme des histoires familiales. Très jeune, on le diagnostique atteint de la drépanocytose, une maladie génétique se caractérisant par l’altération de l’hémoglobine. Il est ainsi régulièrement contraint à suivre de longs séjours à l’hôpital. C’est sa souffrance quotidienne qui se retrouvera alors dans ses écrits, quant il commence à raper, relatant sa jeunesse et sa difficile situation. En 2000, il public ont tout premier album solo “H.N.I.C” (Head Nigga In Charge) sur le label Lourd Records.
Sa maladie est là encore un thème abordé, de même que les raisons de sa dépendance au cannabis et à la morphine. Le projet est plut bien accueilli par la critique et le public, on y retrouve des talents tels The Alchemist ou celui qui deviendra son compère de toujours: Havoc. Le 06 novembre 2003, Prodigy est cependant condamné pour possession de marijuana et d’arme à feu. Il purgera d’ailleurs une peine de prison de 3 ans au pénitencier de Rikers Island. A sa sortie, il publiera son autobiographie “My Infamous Life”.
Artistiquement parlant, le rappeur a sans cesse varié entre albums et mixtapes au fil des années. “Return of the Mac” notamment, son second album solo, devait à l’origine être une simple tape, mais sa grande qualité lui a finalement permis d’être présenté comme un véritable album.
Dans la droite lignée de ses productions, il sortira “H.N.I.C Pt. 2” en 2008 et “H.N.I.C Pt. 3” en 2012. Au total, sa carrière solo s’émaille de 6 opus, ainsi que 4 mixtapes et quelques compilations. Particulièrement productif, il ne se sera jamais arrêté d’écrire, contribuant ainsi à ériger sa légende. Mais évidemment, la plupart connaissent également Prodigy en duo avec l”illustre formation Mobb Deep.
Mobb Deep: un duo incontournable
Si Mobb Deep fut capital dans la carrière de Prodigy, le duo l’est également dans toute l’histoire du rap. En activité depuis le début des années 90, ils ont grandement participé à populariser l’image de la West Coast. EN 1995, avec l’album “The Infamous”, ils atteignent le sommet de l’art avec des titres tels que “Survival of the Fittest” ou le culte “Shook Ones Part. II” (considéré encore aujourd’hui comme l’un des meilleurs morceaux de rap). C’est d’ailleurs cette popularité qui couvre la décennie 90 que Prodigy pourra par la suite entamer une carrière en solo.
Mais Mobb Deep n’aurait pu se faire sans la rencontre d’Havoc sur les bancs de l’école. Se liant d’amitié et partageant tout deux la même passion pour le rap, il n’en fallait pas d’avantage pour nourrir le désir de s’associer pour faire grandir la musique. Se positionnant sur un rap résolument hardcore, ils subissent de fait les foudres des détracteurs qui ne voient que violence injustifiée dans le rap. Ce qui ne les convaincra pas pour autant d’adoucir leurs propos, et ils conservent au contraire leur ligne de conduite. Parler de la rue, ce n’est pas toujours avec une belle formulation, alors qu’importe ! En 1996, ce sera également le très bon “Hell on Earth” qui viendra confirmer (s’il le fallait encore) la qualité du groupe. Originaires du Queens eux aussi, Havoc et Prodigy sont considérés comme les dignes représentants du quartier et de la ville au même titre que Nas.
Par la suite, le groupe connaîtra d’avantage de complications. Tout d’abord, l’album “Murda Muzic” témoigne d’une atmosphère moins sombre que précédemment. Certaines critiques sont alors soulevées à ce sujet. De plus, alors en guerre contre Nas, Jay Z n’hésite pas à prendre publiquement à parti Mobb Deep. En sus de tout cela, les nombreux et réguliers allers et retours à l’hôpital de Prodigy alternent son image. Enfin, la sortie de son premier album solo est prise comme un aveux muet d’une fin prématurée pour son alliance avec Havoc. Les rapports avec le label Loud Records se détériorant, ils décident de fonder leur propre maison de disque: Infamous Records. Ils signeront aussi en 2005 sur le label G-Unit Records de 50 Cent. C’est le début d’une perte d’intérêt des fans pour Mobb Deep, qui se voit de plus en plus reproché le fait de rentrer dans le rang avec un rap plus consensuel, honnête mais sans véritable éclat et surtout, bien loin du rap conscient des débuts. A noter que les deux MC’s se positionne justement à une période d’énorme transition pour le rap, leur musique ne pouvant donc que forcément pâtir d’une transformation. Quoiqu’il en soit, c’est tout l’agitation médiatique autour de leur talent qui est jugé de plus en plus perdu qui pousse les deux artistes à se tourner vers une carrière solo. A ce niveau là, il faut reconnaitre que Prodigy s’en sort mieux, avec d’avantage de retour public. Sa peine de prison mettra logiquement en suspens sa carrière et l’avenir du groupe, bien que dès sa sortie 3 ans plus tard on retrouve peu de temps après le maxi “Black Cocaine EP”. Avec The Alchemist et Nas en invités, Mobb Deep témoigne toujours d’un excellent entourage. Malgré les difficultés, Mobb Deep n’est pas fini.
Une fin hélas prématurée…
Hélas, le destin ne semblait pas avoir les mêmes dispositions. Alors qu’en 2012 l’on découvrait “H.N.I.C Pt. 3” de Prodigy, le duo annonçait en mars 2015 un nouvel album, spécifiant qu’il serait entièrement produit par le fidèle The Alchemist. On ne pouvait donc que s’attendre à une continuité dans la longue carrière des deux rappeurs. Jusqu’à aujourd’hui, où nous pleurons le départ brutal de Prodigy, des suites de sa longue maladie qu’il aura subit tout son vécu. Malgré les critiques, malgré les pertes de vitesse, les changements de direction artistiques qu’on aura pu lui reprocher, on retient de Prodigy un véritable passionné qui de tout temps se sera voué à sa musique, la modifiant, l’actualisant, mais ne perdant jamais son âme et ce pendant de longues années. malgré une fin brutale, l’histoire est déjà écrite et longtemps encore, en solo ou en compagnie de Havoc, on retiendra encore le prodigieux rappeur qu’il fut. R.I.P Prodigy…