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[TUTO] Comment percer dans le rap sans talent ?

Le rap est une jungle bien étrange, où se côtoient les requins, les serpents et les félins. Difficile de s’y retrouver pour un nouveau venu, pourtant chaque année plusieurs nouvelles têtes font leur apparition sur le devant de la scène … Sont-ce les plus talentueux ? Que nenni.

Les passionnés me rejoindront sans doute, cette scène est loin d’être réservée aux rappeurs les plus talentueux, elle aurait même parfois tendance à les ostraciser. Dans les rangs de l’indé on trouve donc sans problème des dizaines de petits frères qui graillent le micro avec souvent bien plus d’appétit et d’idées que ceux qui émergent mais comme disent les anciens dans ce monde il y a beaucoup d’appelés pour peu d’élus

Talent et percée : aimants contraires ?

Bien entendu tout le monde ne peut pas percer mais si les places sont aussi chères pourquoi semblent elles réservées à des rappeurs médiocres qui n’apportent souvent aucun justificatif textuel ou même conceptuel d’un tel succès ? Et bien la réponse est simple, parce que la majorité du public français n’est pas chineur mais consommateur. Les majors sont des entreprises, pourquoi s’embêteraient elles à rechercher des talents originaux quand signer et formater des artistes cleanex leur suffit à garantir un surf très lucratif sur la tendance du moment ? Bien naïf celui qui croit que l’amour de la musique est le seul moteur de celui qui encaisse le bénéfice …

Mais alors comment renoncer à son indépendance artistique et atteindre ce premier chèque tant convoité de 7% des recettes ? Plusieurs méthodes s’offrent à vous.

  • Dans un premier cas vous êtes “petit frère de” et les gens vous accorderont du crédit avant même que vous ayez ouvert la bouche, cela n’est pas synonyme de médiocrité pour autant mais quoi qu’il en soit vous aurez moins ramé que votre grand frère.
  • Deuxième possibilité vous jouissez de fonds particulièrement importants, qu’un grand de chez vous ait poussé de l’argent sur votre tête ou que vous ayez touché un héritage juteux ne change rien à l’affaire : Les portes s’ouvriront plus vite et vous pourrez booster vos contenus dès leur sortie.
  • Dans un troisième cas vous êtes introduit ou “validé” par un rappeur déjà reconnu, vous bondissez donc immédiatement du rang d’inconnu au bataillon à celui d’artiste à suivre, encore une fois avant même d’être écouté vous bénéficierez déjà d’un crédit aux yeux du public.
  • Dans un dernier cas vous n’avez ni piston ni argent mais possédez un don particulièrement bluffant, vous êtes du calibre des plus grands, détenez le feu sacré et un simple freestyle de vous deviendra viral sans trop d’efforts de votre part … Vous l’avez compris beaucoup seraient encore dans l’ombre si le succès ne s’acquerrait que comme ça.

Nous traversons une époque d’imposture artistique, où le bélier du consumérisme tend à prendre d’assaut l’un des derniers bastions qui lui résistait encore jusqu’ici, l’art. Et si hier comme certains le souligneront, il y avait déjà de mauvais chanteurs à succès et des minois comme seul argument de vente, le fait est que le phénomène s’est tellement étendu que nous doutons réellement que même un Brassens eût touché aujourd’hui un aussi large public qu’à l’époque.

“Il n’a jamais été aussi facile d’être un faux artiste, un escroc, que dans le siècle où nous vivons”

-Eric Emmanuel Schmitt-

A qui la faute ?

Nous n’avons certes pas tous les éléments permettant une compréhension globale de ce phénomène alarmant mais en voici néanmoins quelques uns.

S’il est facile d’accuser les grosses maisons de disque pour leurs choix à visée lucrative qui boudent le talent il serait juste de reconnaitre que la faute est partagée dans le cercle vicieux de la médiocrité ambiante. Si l’artiste est devenu produit c’est aussi parce que le public le jette dans son caddie ! En bon consommateur il utilise l’album comme un support de divertissement uniquement et l’aspect culturel s’envole donc en même temps que la critique lucide. Pour conclure et comme nous le disait Busta Flex en interview il y a “très peu de gens qui calculent la technique” … Merci à lui de nous avoir fait profiter de son expérience, merci à toi artiste de l’ombre qui lit cet article ainsi qu’à tous ceux qui auront pris le temps d’atteindre ces ultimes lignes, big up !