Sous chaque angle, la vie affichait un grand sourire en direction de la chanteuse Kelis à l’aube de la décennie. Entre son succès commercial de son premier album Kaleidoscope en 1999, sa récompense au BRIT Awards en 2001 ou encore sa tournée au côté de U2 et Moby, tout laisse présager un bel avenir pour la vocaliste. Pourtant, lors de la sortie en 2001 de son album Wanderland, les affaires ne se passent pas comme prévues. Retour sur sa carrière et cet événement.
Un destin Wanderful
Avant son arrivé dans l’industrie, Kelis était avant une enfant prodige née dans le quartier d’Harlem à New-York et qui aura, dès ces 14 ans, rejoins l’école de Laguardia Arts pour apprendre à jouer du saxophone. Si elle avait hésité à pratiquer sa deuxième passion de cuisinière, elle n’hésitera pas à plonger tout son être dans la musique. Après avoir enchaînée quelques Bread Jobs, elle s’aventurera dans le monde du Hip Hop en effectuant, dans un premier temps, les back-vocals sur le morceau Fairytalez du groupe GraveDiggaz. Mais sa rencontre avec les étoiles montantes que sont le duo des Neptunes lui offrira une collaboration durable et unique.
Avec Kaleidoscope, les trois artistes aboutiront à leur premier œuvre, qui se voudra être un savoureux mélange de Disco et de Funk démystifiant les codes RnB trop bien encrés dans la tête des auditeurs. Pharrell et Chad viendront encadrer la production pour confectionner un produit unique en cette fin du XXeme siècle. Une marque de fabrique qui aura su avoir un impact énorme au sein du Royaume-Uni notamment avec le single Caught Out There défrichant les clichés de la femme passive face à l’homme autoritaire. Pour autant, il n’atteindra pas la banquise capitaliste qu’est les Etats-Unis.
Si la chanteuse aura réussit à trouver un fruit juteux en ce label que fût Virgin Records, elle en payera rapidement les frais avec l’un de ses album qui aurait pu la faire devenir une célébrité dans son pays. En 2000, lorsqu’elle se penche sur l’enregistrement du projet, accompagnée de son duo de producteur, elle réserve une maison au bord de la plage en Virginie dans le district de Sandbridge pour s’écarter du bourdonnement incessant de New-York. Dedans, une vingtaine de professionnels se partagent les murs pour y composer la pièce maîtresse dans le studio. Durant deux mois, les sessions de nuit se multiplient pour donner forme à l’album Wanderland.
L’innovation, vecteur de soucis
Un concentré d’énergie est alors exposé de part la voix dévergondée de Kelis se mêlant à une envie toujours plus probante de prouver qu’elle n’est pas qu’une artiste RnB. Pour cela, elle révèle sa versatilité en termes de lyrics et de flow. Perfect Day en est un bel exemple avec cette guitare enrayée venu élancer un refrain presque rock ou bien le triptyque Little Suzie/Star Wars/I Don’t Care Anymore traitant de la dépense amoureuse jusqu’au lâcher prise vers la liberté certaine. Son attitude prétentieuse se ressent dans disque détruisant quelques barrières de genre musical.
Mais, alors que la maquette était assemblée et prête pour le label, la compagnie ne comprendra pas la démarche artistique et ne placera qu’un budget restreint pour la promotion. S’ils lui assureront qu’elle couvrira l’Europe, son coup de poker dans le nouveau monde semble compromis. Il faut dire que la firme est en plein licenciement, notamment envers les exécuteurs prenant les décisions pour le managent de leur musique. Résultat : la petite boite en plastique ne sera pas distribué dans les bacs des disquaires ‘ricains. Dans la foulée, elle dira au revoir à Virgin, l’obligeant à ne sortir qu’un seul single : Young, Fresh ’N’ New.
Les années défilent, et la chanteuse entamera une relation avec Nas et effectuera un détachement avec les Neptunes pour se laisser guider par de nouveaux compositeurs comme Dallas Austin ou Rockwilder, venus apporter de la nuance aux accords. En 2003, l’album Nasty comportera le morceau Milkshake qui deviendra son hymne phare pour représenter cette conquête vers l’Amérique du Nord. Et même si elle ne réitérera pas de tels chiffres de ventes, sa trajectoire resta bienveillante, avec trois albums dont un dernier nommé Food, surement en l’honneur de son nouveau travail en tant que gérante de food-truck, et qui épousera une dimension bien plus expérimentale, s’engouffrant dans un Funk psychédélique propre au label qui programme cette œuvre : Ninja Tune.
Si la discussion autour de cette artiste mérite d’être faite, c’est tout d’abord grâce à la sortie aux USA de Wanderland sur les plateformes de streaming à la date du 5 juin 2019. Car, même si notre chère France aura déjà eu la chance d’acheter ou d’écouter l’album dès 2001, les Américains vont pouvoir se réjouir d’entendre enfin cet album qui n’a pas pris une ride, prouvant tout le génie de Pharrell avec ses beats minimalistes aux drums explosives, ainsi que l’authenticité de Kelis dès qu’elle s’empare du micro pour nous dresser le portrait de sa vie.
https://open.spotify.com/album/5fQ2D3hi2VhhavqhpZfESf