On termine notre semaine avec le traditionnel Retour vers le classique, le rendez-vous habituel de tout amateur de bon son à l’ancienne. East Coast, West Coast… Les titres incontournables de l’époque sont réunis entre ces lignes afin de vous offrir une compilation de ce qu’il se fait de mieux, ce que l’on peut trouver de mieux dans le rap. Pour cette fois, c’est une sorte de condensé best-of que l’on vous fournit avec un super featuring réunissant les grands noms du business: Pete Rock, Ghostface Killah, Raekwon & Prodigy avec le titre “Tha Game”.
Le son vient de New-York…
Si tous ces noms nous sont forcément familiers, il faut tout de même relever le fait que Pete Rock reste l’inconnu du groupe pour ce texte. Car en effet, on a pas encore eu l’occasion d’aborder l’artiste dans ces lignes. Peter Philips de son vrai nom est un pur produit new-yorkais. Usant d’un style mixant soul et jazz, sa musique possède une couleur facilement reconnaissable et qui font de lui l’un des noms majeurs du hip-hop. S’il commence sa carrière dans le monde de la musique en tant que DJ, c’est surtout de par son duo avec C.L. Smooth qu’il se fait connaître dans le rap. Après la séparation des deux, Pete poursuit dans la production et oeuvre pour de nombreux artistes de la côte Est, se faisant un nom et une réputation (notamment par son statut d’animateur radio) tout au long des années 90. ce n’est qu’en 1998 qu’il publie enfin son premier album solo: “Soul Survivor”. De là est d’ailleurs extrait le classique d’aujourd’hui: “Tha Game”. De par sa renommée dans la production, il peut aisément se permettre de convier de prestigieux noms sur son album, et le fait justement très bien sur ce son avec Ghostface Killah, Raekwon et Prodigy.
A l’époque, convier les illustres membres du mythique Wu-Tang Clan semble une logique évidente. Habitués à poser entre eux, Ghostface Killah et Raekwon assurent un featuring de qualité. De plus, il faut bien mentionner le regretté Prodigy, moitié de Mobb Deep qu’il forme avec Havoc et qui vient clôturer ce quatuor. En tout cas ce sont principalement ces trois derniers qui sont mis en avant, Pete Rock assurant la prod et se laissant tout de même aller à lâcher un petit couplet au final. Fort de leurs images communes de numéro 1 du rap game, chacun peut aisément se laisser aller au traditionnel exercice de l’egotrip, sans cesse revisité, sans cesse maîtrisé. Cela commence ainsi dès la première ligne de Raekwon au premier couplet (“Call me the black champion, Guess down, wanna test now”) qui annonce ainsi la couleur. La technique est là encore présente, enchaînant les rimes et assonances (“Amazing, blazing Purple Haze spaceships/Blazin asians in Mercedes Benz stations”). Avec toujours, en profondeur, le rapport entre la violence des rues et la jeunesse (“guns that burn, sons that learn”). Une profondeur dans les thèmes sous-jacentes, que l’on retrouve aussi en fin de couplet (“Puffin these marijuanas make Allah catch Alzheimers”). Prodigy à son tour poursuit sur la même arrogance (“You don’t belong in my eyesight, P’s a powerful soldier”), soutenant un couplet de bonne facture. On retiendra d’ailleurs du côté de la production le sample de “Shook Ones” de Mobb Deep “You’re all up in the game and don’t deserve to be”.
…et ses représentants aussi
Une sorte de coupure avant de reprendre de plus belle avec le second membre du Wu-Tang Clan qui sait faire référence à son entourage (“Snatch RZA last piece of fish right off the glass dish”). Techniquement, Ghostface Killah se repose sur une multitude de références et un name dropping de fait très présent (“Half a face wig sewed together like Manhattan Chase […] Castor Troy layin for Travolta mic gun pump”). Ceci, avant que Pete Rock ne viennent clôturer le son en rajoutant sa petite touche personnelle avec son couplet. Dans la droite lignée de ce qu’on a pu entendre jusqu’alors, il n’hésite pas à se mettre lui aussi en avant. Le classique que l’on reconnait dans ce son est d’ailleurs réclamé (“Legendary status with the way the track started”) et en guise de signature, il dédicace tout ce petit monde (“Rae Progidy Ghost rhyme professional/The original, Pete Rock is like Soul on Ice”).
En ce qui concerne l’instru, Pete Rock réussit un travail d’orfèvre. Conciliant musicalité, rythme et esprit East Coast, il signe là une prod parfaitement calibrée afin que les différents MC’s puissent poser leur flow. Un aspect dansant et joyeux qui vient justement à l’encontre des textes bruts et déterminés, matinés de prétention et d’egotrip.
Au final, dès son premier album, Pete Rock aura su nous montrer qu’il a le bras long et que ça peut bien servir ! Réunnissant les têtes connus du Wu-Tang, conviant le talentueux Prodigy et se laissant même lui aussi à venir poser sa voix le temps d’un couplet final en plus de l’instru qu’il gère entièrement, on peut dire que le travail est réussi ! Au final, cela nous donne un excellent featuring qui aura su marquer son époque, et le rap entièrement. Un classique de plus à rajouter à la liste, pour un son qui, plus que tout autre, représente New-York.