Notre hommage à Prodigy, qui nous quittait il y a maintenant quatre ans

Il était un des plus grands rappeurs américains de sa génération. Son charisme, son univers sombre et son duo avec Havoc ne peuvent être oubliés. Hommage à Prodigy.

Le 20 juin 2017, le monde du hip-hop apprend une nouvelle déchirante. Prodigy n’est plus. Le rappeur de 43 ans a visiblement succombé à sa maladie génétique, la drépanocytose, dont il souffrait depuis toujours et qui causait un ralentissement de la circulation sanguine. On apprendra plus tard qu’il s’en est allé rejoindre au paradis des rappeurs Notorious B.I.G et Tupac à la suite d’un étouffement accidentel.

Quelque soit les raisons de sa mort, tous le pleurent et lui rendent hommage. Ça va de soi, tant Prodigy incarnait le rap en personne. Charisme, vécu, flow, authenticité, classiques, héritages… Il cochait toutes les cases des géants parmi les grands.

Sombre et charismatique

On le découvre au milieu des années 1990 aux côtés de son acolyte de toujours, Havoc. Ensemble, ils forment Mobb Deep après s’être rencontrés au lycée et sortent rapidement leur premier album “Juvenile Hell” en 1993. Si le projet s’avère être un échec commercial, la patte Mobb Deep est déjà en partie posée. Les deux gamins à peine majeur veulent retranscrire leur mode de vie de la manière la plus fidèle et crue possible. A contrario d’un Nas très narratif ou d’un Notorious B.I.G qui endosse l’image du grand gangster.

C’est avec l’enchaînement sans faute des albums “The Infamous” en 1995 et “Hell On Earth” en 1996 que Mobb Deep va marquer son époque. Havoc est désormais seul derrière les machines et livre des beats sombres aux samples aussi mélancoliques qu’oppressants. Prodigy peut laisser parler sa classe au mic’, jamais dans la démonstration mais toujours terriblement efficace. Avec ses lyrics réalistes, violents et sans concession, Mobb Deep propose une carte postale à ses auditeurs un peu spéciale : les rues glauques de Queensbridge ne semblent plus avoir de secret pour vous après avoir écouté le binôme.

Des classiques à la pelle

Il n’y a quasiment rien à jeter dans ces deux projets passés à la postérité. Mais il y a des highlights évidents, des classiques instantanés. “Shook Ones Pt.1” et “Survival of the fittest” sur Infamous, “Hell on Earth (Front Lines)” sur “Hell On Earth”. Tous content plus ou moins le même thème : la rue et ses dangers exposés de la manière la plus brut possible. Comme si Havoc et Prodigy étaient les bourreaux et chuchotaient à l’oreille de leur victime, nous, qu’ils allaient nous dépouiller au coin d’une ruelle.

À cette époque, tout le monde veut faire une instrumentale comme Havoc, tout le monde veut poser comme Prodigy. Leurs enfants illégitimes dans le rap sont nombreux, jusqu’en France. Ce n’est pas un secret, et cela s’entend à l’oreille, qu’à la conception de leur album “Mauvais Oeil”, Lunatic s’est grandement inspiré des ambiances de Mobb Deep. Chez La Cliqua, NTM et la grande majorité des rappeurs hexagonaux de l’époque, on retrouve cette façon de poser qui n’existait pas avant l’arrivée de Mobb Deep sur l’échiquier. Ce constat pose leur influence.

Une carrière solo sous-côté

Mais puisque le hip-hop est un perpétuel cycle, leur album “Murda Muzik” en 1999, jugé un ton moins radical que ses aînés, connait un succès critique et commercial moindre. Il est pourtant excellent et mérite d’être écouté avec la même passion, ne serait-ce que pour les titres “Quiet Storm” et “Murda Musik”.

Si le groupe ne retrouvera jamais sa gloire et se perd un peu notamment à cause de nombreux désaccords avec sa maison de disques, il connait une deuxième jeunesse avec le G-Unit de 50 Cent au milieu des années 2000. A écouter par curiosité. Mais ce qui est très intéressant chez Prodigy et bien trop méconnu au vu de la qualité de sa discographie, c’est sa carrière solo.

7 albums à partir de 2000 et plusieurs mixtapes. Le rappeur conserve sa démarche authentique et continue de rapper sur des prods ultra efficaces, sans concessions pop. Il s’entoure alors de son autre grand pote, The Alchemist. C’est ce dernier qui va produire la majorité des chansons de ‘P’ en solo et une vraie alchimie va se créer. “H.N.I.C” (2000) et “Return Of The Mac (2007) sont des pièces majeures pour tout amateur de rap US.

Prodigy, c’est donc une discographie immense, à écouter et réécouter à l’infinie. C’est aussi un charisme et une voie aussi simple qu’inimitable. C’est aussi un mec qui a passé plus de 3 ans derrière les barreaux (de 2011 à mars 2007) pour port illégale d’armes à feu et qui a refusé de balancer 50 Cent afin d’obtenir une remise de peine. C’est aussi un homme qui vivait constamment avec la mort à ses côtés, car malade chronique. Prodigy c’est une légende du rap américain, tout simplement.

Sim
Sim

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