Le Juiice : « Je suis tourné vers les Etats-Unis car la culture du rap vient de là-bas » [Interview]

Après sa participation au troisième volume de la Relève, la compilation de Deezer, Hip Hop Corner a échangé avec Le Juiice pour parler de ses projets.

En ce premier semestre de l’année 2020 entaché par le COVID-19, peu de rappeurs ont pu tirer leur épingle du jeu. Parmi les quelques noms, on peut penser à Le Juiice. Après avoir distillé plusieurs morceaux ces dernières années, la rappeuse s’est jetée dans le grand bain en sortant en février son premier projet, l’EP Trap Mama.

Par la suite, elle ne s’est pas arrêtée en si bon chemin. Le Juiice a monté son propre label, Trap House et a participé à la nouvelle compilation, La Relève. A l’occasion de sa participation à cette compilation en exclusivité sur Deezer, nous sommes revenus sur ses différents projets.

HHC : Salut Le Juiice, comment se passe le confinement ?

Le Juiice : « Tranquille, ça permet de souffler et puis de travailler en studio, vu qu’il y a que ça à faire.

Le 14 février dernier, vous avez sorti votre premier projet, l’EP, Trap Mama. Quel ont été les retours ?

Les gens qui me suivent depuis longtemps attendaient beaucoup Trap Mama et ils n’ont pas été déçus. Il y a aussi beaucoup de personnes qui m’ont découvert avec ce projet. Ça m’a permis d’élargir ma fan-base. Dans l’ensemble, j’ai reçu beaucoup de bons retours.

J’ai l’impression que votre projet a eu un écho plus large auquel vous ne vous attendiez pas.

Franchement ouais, je m’attendais pas à ça. Même les titres les plus appréciés par le public, ça m’étonne.

Ah oui ? Est-ce qu’il s’agit des titres clippés « Shoot » et «Drip » ?

Même pas, c’est plutôt « Black Samouraï » et « Poetic Justice ». Ce sont des titres différents de ce que j’ai pu faire auparavant.

Revenons à votre participation à la Relève. Comment s’est passé la collaboration Le Juiice X Deezer ?

Ils m’ont contacté et ça s’est fait automatiquement. Ça fait plaisir d’avoir une certaine reconnaissance des professionnels de la musique, d’autant plus avec cette compilation qui met en avant la relève du rap. C’est pas une chose à laquelle je m’attendais particulièrement, mais ça fait plaisir quand ça arrive.

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Est-ce qu’il y avait une ligne directrice à suivre pour le projet ?

Non, vraiment on était libre de faire la musique qu’on voulait faire. J’ai proposé le titre « Fais un vœu » et ils l’ont accepté naturellement.

Il y a quelque chose de très marqué dans votre rap, c’est votre inspiration américaine. Pourquoi êtes-vous autant tourné vers les Etats-Unis ?

C’est quelque chose qu’on me dit souvent, mais pour moi ça me semble logique que je sois tourné vers les Etats-Unis, étant donné que la culture du rap vient de là-bas. Je pense que ce sont plutôt ceux qui s’en éloignent qui sont bizarres. J’ai plutôt l’impression que je fais du rap tandis que d’autres font du rap français. Le rap ne vient pas de France, donc c’est logique que je sois imprégnée de cette culture que j’aime. Après je reste française donc je rappe en français et mes références viennent d’ici.

Une autre chose marquante dans votre rap, c’est votre écriture, notamment via l’utilisation de gimmicks. Vous vous inspirez aussi du rap américain pour écrire vos textes ?

Je pense que le fait de comprendre l’anglais, ça me permet de voir comment les rappeurs américains écrivent. Et je peux l’adapter à ma façon, en français.

Comment vous travaillez en studio ? Est-ce que vous travaillez exclusivement avec une équipe de producteurs comme Draco Dans Ta Face ou vous sélectionnez les productions que vous recevez ?

Je reçois toujours des prods par mail donc si une me plaît je peux rapper dessus. Après, avec Draco, on se connaît donc on peut composer direct en studio. Avec lui, je peux avoir une vision précise de ce que je veux avoir.

Vous venez de monter votre label Trap House. Est-ce que vous vous inspirez aussi des Etats-Unis pour cette vision entrepreneuriale ?

Pour le coup, ce n’est pas une histoire d’influence, ça vient de mon caractère. Il y a des personnes qui préfèrent laisser ce côté business à d’autres, tandis que moi, j’aime bien gérer mes propres affaires. J’ai un peu de mal avec l’autorité, je ne me vois pas être dirigée ou avoir un producteur. C’est naturel pour moi de diriger. C’est logique que ce ne soit pas quelqu’un qui paye mes séances de studio, c’est l’indépendance jusqu’au bout.

Quelle est votre ambition avec votre label ?

En plus de produire mes projets, il y a clairement l’ambition de produire d’autres personnes. Je veux mettre en lumière les gens qui n’y sont pas. Déjà, lorsque je me suis mise à rapper, c’est que j’estimais qu’il n’y avait personne pour me représenter. Donc il y a cette ambition de mettre en lumière des personnes avec un style un peu plus underground.

Ce qui vous représente, c’est ce côté débridé dans votre musique, celui d’assumer sa féminité. Est-ce que c’est ce type de profil que vous voulez mettre en avant ?

Je veux mettre en avant des femmes principalement. J’ai quelques pistes déjà de personnes que j’aimerais développer. A choisir, si je pouvais ne produire que des femmes, je le ferais. Dans la société en général, je pense que tous les panels de femmes ne sont pas assez représentés. Pour prendre le rap, tu vas avoir des mecs de cité qui t’expliquent leur train de vie, mais il y a aucune femme sur ce terrain.

On a la chance d’avoir la vision d’Aya Nakamura ou d’une Wallen à l’époque, mais maintenant, il faut que tous les panels des femmes soient représentés. Dans les cités, il y a les meufs qui font des conneries, pour certaines, c’est le train de vie famille, il y a plein de message que l’on n’a pas encore entendu.

Est-ce que vous avez des modèles d’artistes ou de représentations féminines qui vous inspirent en France ou ailleurs ?

En France, je pense à Yseult, c’est une artiste que j’apprécie beaucoup et qui est même un exemple. Voilà, elle a ouvert son label, elle s’assume pleinement, elle délivre son message, elle est décomplexée au niveau de son corps. J’aime beaucoup Meryl aussi.

Sinon aux Etats-Unis, j’écoute beaucoup de soul donc je pense à des meufs comme Ari Lennox, Summer Walker. J’aime bien la rappeuse Mulatto. De toute manière, peu importe le style, j’aime bien les gens qui s’assument.

J’ai vu que vous avez profité du confinement pour tenir des live Instagram où vous invitez les gens à freestyler et notamment des rappeuses.

Ouais, c’est cool, ça m’a permis de voir qu’il y a beaucoup de femmes qui rappent. Je pense aux maisons de disques, ça doit dur de faire leur choix, il y a tellement de talents.

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Vous êtes en ce moment enfermée en studio. Vous préparez la suite ?

Ouais, on prépare la suite. L’idée, c’est d’envoyer du nouveau pour très vite.

Mehdi
Mehdi

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