Retour vers le classique : quand Kendrick Lamar a détruit tout le rap game sur “Control”

C’était il y a six ans, lorsque Kendrick Lamar mettait un gros high kick dans les joyeuses du rap game sur “Control” de Big Sean.

Il y a des titres qui marquent à jamais la carrière d’un artiste. Pour Kendrick Lamar, “Control” en est l’exemple parfait. Encore aujourd’hui, on en oublierait presque que l’interprète principal du son est Big Sean, tant le rappeur de Compton a récolté tous les égards à la sortie du morceau.

Remettons-nous dans le contexte de l’époque. En août 2013, Kendrick est déjà signé par Dr. Dre et a déjà fait sensation avec son premier album en major Good kid m.a.a.d City. Néanmoins, il est encore loin d’être la superstar qu’il est aujourd’hui. Pour le resituer, il faisait à peine la première partie d’Eminem lors de son retour au Stade de France la même année. Encore une jeune pousse donc.

Mais rien à foutre. L’étoile montante K-Dot qui n’a pas froid aux yeux a choisi de frapper fort pour s’imposer. Dans un couplet assassin de plus de trois minutes, il n’hésita pas à s’auto-proclamer à la fois “fils spirituel de 2Pac” et “Roi de New York”.

Descendant de Makaveli, passe encore, mais se poser seul, en artiste originaire de LA sur le trône du rap New-Yorkais, forcément que cette arrogance allait faire jaser. L’Histoire aurait pu s’arrêter là, mais King Kendrick est allé plus loin encore en s’attaquant frontalement à tout le gratin du rap US de l’époque.

J’ai entendu des coiffeurs en grande discussion sur “qui est le meilleur MC ? Kendrick, Jigga et Nas, Eminem, Andre 3000 et tous les autres, vous êtes nouveaux là-dedans, n’approchez même pas. En général je suis pote avec mes collègues, mais c’est du hip-hop et ils devraient savoir l’heure qu’il est. C’est pour Jermaine Cole, Big KRIT, Wale, Pusha T, Meek Mill, A$AP Rocky, Drake, Big Sean, Jay Electron’, Tyler, Mac Miller. Je vous aime, mais j’essaie de vous tuer. Je veux m’assurer que vos fans n’ont jamais entendu parler de vous et qu’ils ne veulent plus entendre un seul mot sortir de votre bouche. Je mets la barre plus haute, qui veut la franchir ?

Avec le recul, il ne faut pas avoir fait des années d’études pour parvenir à analyser ce couplet. Plus qu’un sourire diabolique adressé à ses rivaux, Kendrick réalise ici est une véritable démonstration d’audace et de force. Une compétition de hip-hop dans sa forme la plus saine en somme. Pied de nez amusant par ailleurs, il a le culot de clasher Big Sean et Jay Electronica sur leur propre titre. Et ça, ça fait mal.

Un véritable séisme

Après de telles salves verbales, vous vous doutez bien que la sphère hip-hop s’est très vite enflammée. Le public n’en revenait pas et de nombreux artistes ont réagi. Si ASAP Rocky avait qualifié Kendrick de“fou”, d’autres, dans un esprit de compétition revanchard, ont préféré lui répondre en musique. Mais pas forcément ce que l’on attendait

En effet, rares sont les artistes visés directement par Kendrick à avoir répliqué au micro. Des noms comme Joel Ortiz, Papoose Lupe Fiasco, Fred The Godson, King Los, B.o.B ou encore Cassidy ont bien tenté de contre-attaquer, mais aucune de leurs réactions ne fera autant de bruit que le couplet original.

De son côté, le bourreau de ces MC’s avait réagi quelques temps plus tard à sa performance, en expliquant qu’il s’agissait seulement d’une compétition dans un pur esprit hip-hop et pour l’amour de la culture.

“Honnêtement, je ne pensais qu’il y aurait autant de spéculations. Je voulais juste rapper. Tous ceux qui me connaissent dans le milieu savent que je veux juste rapper”

Il a également éclairci ce qu’il entendait en s’auto-proclament “Roi de New-York” :

L’ironie dans l’histoire c’est que les gens qui ont compris cette punchline sont ceux qui sont réellement les rois de New York. L’important, ce n’est pas d’être le roi de la East Coast ou de la West Coast, c’est de laisser une trace aussi grande que celle de B.I.G. et 2Pac”

Résultat ? Six ans plus tard, le couplet de Kendrick Lamar sur “Control” résonne encore dans la tête de nombreux auditeurs comme l’une des plus belles diss track de l’histoire du rap. A raison qu’elle n’est pas motivée par la haine, mais seulement par la passion du hip-hop. Ce couplet témoigne à lui seul de la sagesse de Kendrick, dont la seule volonté à l’époque était de s’imposer parmi les meilleurs de la discipline. Et bien devinez quoi ? Il a réussi.

Jérémie Leger
Jérémie Leger

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